Le monde merveilleux du handicap sur les réseaux sociaux

Miss TSA vous présente ce jour: le monde merveilleux du handicap sur les réseaux sociaux! 

Bon en vrai juste Facebook parce que je suis une vieille carne et que pour le moment c’est sur Facebook que tous les groupes de parents sont très actifs. Donc on reprend: le monde merveilleux du handicap SUR FACEBOOK, plus précisément sur LES GROUPES FACEBOOK (de parents, de pros, de personnes concernées…).

Les réseaux sociaux, quel merveilleux outil quand le handicap nous isole, quand on cherche des informations, du soutien, quelle que soit l’heure du jour comme de la nuit. Petit condensé non-exhaustif des figures immanquables des groupes de parents, professionnels et autres pages dédiées à l’autisme et au TDAH et quelques mises en garde pour les nouveaux aidants-arrivants/brebis qui viennent de recevoir LE diagnostic pour leur enfant.

  • Les groupes EBM/non EBM: EBM signifie Evidence Based Medicine ou pour faire simple « basée sur les preuves ». L’autisme est un monde gangrené de charlatans et de vendeurs de poudre de perlimpinpin. Certains groupes font l’apologie des pseudo-sciences, proposant des traitements dans le meilleur des cas inutiles, souvent dangereux et toujours coûteux. Pour vous éviter perte de temps, d’énergie et d’argent et être guidés dans une PEC (prise en charge) qui va vraiment permettre des progrès à votre enfant, rejoignez de préférence des groupes EBM, qui ont pour ligne directrice l’application et le respect des recommandations de la HAS. Et si, en plus de cette PEC respectueuse des recommandations HAS (qui ne sortent pas d’un chapeau mais de méta analyses sur le sujet puis consensus scientifique) vous avez envie d’emmener Titi se faire magnétiser par un contact de tata Gertrude pendant les vacances en Ardèche, allez-y. 
  • Le-la professionnel-le couteau-suisse: vous guettez LA personne qui pourra accompagner votre enfant au quotidien, vous ne connaissez encore rien au domaine de la prise en charge de ce handicap spécifique mais vous avez vu les mots clefs sur les sites officiels ou sites traitant du sujet: ABA, remédiation cognitive, montessori, PECS, Makaton, sensorialité (oh le joli mot)… Devinez quoi? Certains professionnels du milieu le savent et n’hésitent pas à faire des listes longues comme le bras de tous leurs « domaines de compétence ».Non, on ne peut pas « s’inspirer » de la science du comportement qu’est l’ABA (applied behavior analysis ou analyse appliquée du comportement en français). Tout pro qui se dit spécialisé en ABA mais qui en parle comme d’une méthode n’a… pas de formation de base en ABA! C’est littéralement la première chose que l’on apprend en ABA. Exemple:

Clairement ici les « mots clefs » sont balancés pour rassurer: “oui je suis à fond dans les recommandations HAS, n’ayez pas peur ce n’est pas un énième atelier d’art-thérapie psykk (inspiré de la psychanalyse) en mode garderie”.

  • Les mamans « j’ai tout essayé sauf ce qui est recommandé et rien n’a marché, aidez moi! Encore!! », aussi connue sous le nom des mamans « chercheuses de pilule magique ». Oui je parle de mamans parce que oui ces groupes sont dans l’immense majorité composé des mères aidantes. Ces mamans là sont à bout et elles sont légitimes, leur fatigue est immense, leur quotidien bien m*rdique. Pourtant, dès leur arrivée sur le groupe, quand elles ont demandé ce qu’il fallait mettre en place nous étions nombreuses à prendre du temps et à guider cette maman: pour le dossier MDPH, la prise en charge respectant les recommandations HAS, les pros dans leur région, les formations gratuites ou peu payantes à venir pour améliorer le quotidien grâce à l’analyse appliquée du comportement… Mais cette maman revient sur les mêmes groupes, à se plaindre encore et encore des troubles du comportement de son enfant. Non, elle n’a pas suivi les conseils qui lui avaient été donnés car « pas le temps », elle « n’a toujours pas de place en institution », « l’école n’accepte pas les troubles du comportement de son enfant ». Oui, on voit des mamans qui 3, 4 ans après leurs arrivées déboussolées sur le groupe et des heures passées à la guider, se plaindre toujours des mêmes choses et être persuadées « d’avoir tout fait » parce qu’elles ont acheté des compléments alimentaires, déboursé 350 euros en matériel « sensoriel » et arrêté de travailler. Mais voilà, toujours aucune prise en charge de qualité et surtout des parents qui n’ont rien changé à leur manière de s’occuper de leur enfant. Gérer les comportements problèmes ça se passe à la maison, comme l’éducation de n’importe quel enfant en fait et oui, c’est rude mais « calmer » les crises de junior en lui mettant peppa pig 2h par jour ne risque pas de les réduire en fréquence ou en intensité dans le futur. Il n’y a pas d’opération miracle ni de pilule pour l’autisme, que des efforts, fournis par des parents en très large partie et de quelques pros compétents et pédagogues qui vous accompagneront. On est tous dans le même bain et certes pas tous armés de la même façon, j’en suis consciente, mais ignorer pendant des années les conseils adaptés à sa situation et continuer de se plaindre, ça use les mirettes quand on déroule le feed et décourage les plus motivées d’entre nous à donner les bonnes infos.
  • Les parents « multiposts »: ces parents (oui vous avez vu je me suis calmée j’inclus les papas aussi) ont une question et ils veulent une réponse là, tout de suite. Ils sont sur les mêmes groupes que vous: autisme, TDAH, et autres associés. Du coup, leur question, ils la posent sur tous les groupes, en même temps, pour maximiser leur taux de retour. Bien que l’on puisse saluer l’utilisation d’une stratégie commerciale (aussi plaisante qu’une pub carglass sur un trajet de 8h en voiture), il est important de ne pas devenir une de ces personnes: rapidement, vous n’aurez plus de réponse des personnes les plus qualifiées qui ne souhaiteront pas renforcer ce comportement et vous ignoreront, dommage. Résultat des courses pour les multiposteurs: des tas de réponses, des témoignages, mais pas vraiment d’information utile.
  • Les « étudiant-e-s passionné-e-s par l’autisme »: ils ont créé un formulaire google form pour leur mémoire et ils sont ravis de pouvoir via ce groupe avoir accès à un vivier de parents concernés pour avoir plein de réponses qui iront certainement dans le sens de leur affirmation de départ. 

Allez vous avez bien deux secondes en attendant Loulou qui fait sa séance d’orthophonie donc GO autant aider les jeunes qui veulent se lancer avec entrain dans l’accompagnement de nos petits. Là, PATATRA, les questions vous font frissonner: « avez vous souffert de votre relation avec votre mère? » (ça pue), « votre enfant refuse-t-il votre affection, si oui depuis a.toujours b.ses 1 an c.depuis le diagnostic » (WTF c’est quoi cette étude???), « avez vous vécu un traumatisme lors de votre grossesse? » (voilà c’est clair, l’étudiant-e en psychologie, en 2021, termine sa formation très très fortement teintée de psychanalyse et vous, les vrais traumas que vous avez eu au début de la prise en charge de votre enfant, c’était à cause de ces théories non seulement datées mais sans aucun fondement scientifique. Voilà, vous sortez du google form, récupérez Junior qui sort de sa séance mais qui « n’a rien voulu faire ce jour » selon l’orthophoniste pour vous retaper les 40min de trajet retour maison. Dur.

  • Les administratrices et modératrices des groupes. Au féminin, oui. Des mamans au départ comme vous, jeunes brebis lâchées dans la jungle du handicap mais qui, au fil des années, ont fait les erreurs qu’elles veulent vous éviter en partageant encore et encore les bonnes infos, ont été victimes avec leur enfant de prise en charge douteuses (psykk) et veulent vous l’éviter à tout prix (ouiiii le CMPP est juste à côté de chez vous, mais on a eu 12 familles qui nous l’ont signalé pour des dérives psychanalytiques et signalements abusifs à l’ASE, promis on veille pour vous, nous ne sommes pas « juste » aigries). Pour que ces femmes continuent de faire ce travail chronophage, non rémunéré et assez ingrat soyez sympa et retenez ces 3 commandements: 

– de leur disponibilité tu ne présumeras point (elles dorment et gèrent souvent seule un ou deux enfant en situation de handicap, travaillent quand elles le peuvent encore et croulent sous l’administratif). Les MP super intrusifs, les colères parce que « vous voulez juste de l’aide, là tout de suite, c’est urgent » et qu’on est méchante de ne pas répondre pourrissent la vie des admin et vous font glisser dans la black list officieuse des groupes parce que, NEWS FLASH tou-s-tes les admin et modo des gros groupes se parlent et se concertent, oui, oui. 

– de la loupe tu feras bon usage: outil merveilleux que la loupe, si votre question se porte sur le gevasco, le pps, le déroulement d’une IRM cérébrale, l’épilepsie ou un traitement médicamenteux, tapez le mot dans la loupe et regardez ce qui a été dit avant de poser votre question. Ensuite, posez là avec vos précisions perso si votre cas n’est pas représenté dans les réponses déjà présentes.

– leur 06 tu ne demanderas point, rien à ajouter, on n’est pas sur Tinder, on communique via nos terriers respectifs sur les groupes et on y est tous les jours de l’année (ou presque), ne vous inquiétez pas.

Tour d’horizon rapide des pièges à éviter et des personnes dont vous devez vous méfier… Sauf que, tout n’est pas noir oh non bien loin de ça… 

De mon expérience personnelle, ces groupes Facebook m’ont permis de mettre en place la meilleure des prise en charge pour mes enfants, de faire les dossiers MDPH les plus complets qui soient, d’éviter certains professionnels à l’éthique douteuse et surtout, surtout, de vivre plus que jamais la sororité, la vraie, celle du bout du rouleau comme des bons moments parce que oui, s’entourer de celles qui sont passées par là, qui sont dedans au quotidien depuis encore plus longtemps que moi a été une des expériences les plus enrichissantes socialement de ma vie. Je me suis fait des ami-e-s pour la vie, jamais rencontrées IRL mais rarement un jour sans se parler.