Constipation et TSA

Aujourd’hui un sujet passionnant, glamour et indispensable : le caca. 

Je précise que je partage ici mon expérience de maman et que je ne vous donne aucun conseil médical sur le cas précis de votre enfant.  

Malheureusement, constipation et TSA vont souvent de pair, rendant l’accès à la propreté plus lent, plus complexe et l’instant même de l’éjection des selles désagréable voire douloureux. Comme souvent, quand il y a un diagnostic de TSA, la tendance (des professionnels comme des proches) peut être : « ah oui mais ça c’est à cause de l’autisme ». Une remarque parfaitement inutile puisque la question à laquelle on veut répondre est : « Comment peut-on aider l’enfant à supporter puis kiffer son moment WC, lui souhaitant comme nous tout au long de sa vie de beaux moments de lecture indispensable sur le trône ? ».

via GIPHY

Point 1. Voir son médecin traitant, qui connait bien notre enfant et ses spécificités. Si le vôtre est nul et que vous ne vivez pas sur le plateau ardéchois, il est temps d’en changer. Commencer par prescrire un laxatif léger et surveiller l’amélioration peut déjà changer la donne même si ce n’est pas (forcément) une solution sur le long terme. 

Votre médecin pourra vous envoyer vers un-e spécialiste: un-e gastro-entérologue pour enfants si il-elle le juge nécessaire (oui, oui ça existe).

Point 2. La-le gastro-entérologue en libéral pourra se pencher sur les causes physiologiques de la constipation : en vérifiant la longueur des intestins, proposer un autre traitements et autres analyses plus poussées. WARNING Vous trouverez, même chez les gastro-entérologues, des professionnels dont la pratique est teintée voire baignée dans la psychanalyse : ceux-là vous parleront de « peur du morcellement du soi » chez votre enfant et de travailler sur les peurs primaires et autre bullshit consacrés. Dites oui à tout, sortez carte vitale et 90 euros et fuyez. Pour éviter ça, comme d’hab, les groupes de parents sont là pour vous aider et vous donner des noms de pros dans votre région. Sur Source TSA, groupe certifié EBM sur Facebook, on vous guidera. Sur « Autisme Offre Recherche Intervenant » aussi. Gagnez du temps et demandez.

Point 3 (si besoin). Le suivi dans le public. Muni-e du courrier de votre généraliste précisant le besoin d’un suivi et les spécificités de votre enfant, vous pouvez demander un RDV de suivi dans une unité pédiatrique de gastro-entérologie. Il ne faut pas être pressé, les délais en région parisienne sont de 9 mois d’attente environ actuellement. Mon expérience du suivi pour ma fille au sein de l’APHP est excellent, oui c’est dur d’avoir des RDV mais ils ont l’habitude des profils atypiques et savent chercher bien plus loin que le diagnostic de TSA ou autre déjà posé.

Point 4. L’alimentation quand il y a une réelle sélectivité alimentaire. Pas besoin de vous faire un dessin, quelle que soit la cause de la constipation de votre enfant, plus l’alimentation est chargée en fibres, plus il sera facile d’aller à la selle. La sélectivité alimentaire nécessite à elle seule plusieurs articles mais je me contenterai ici de dire que non, il ne s’agit pas d’une fatalité. 

Tout comme le diagnostic posé sur votre enfant, il s’agit d’une photo prise à l’instant T que bien des choses peuvent faire bouger. Les neuro typiques changent leur alimentation et leurs goûts au fil de leur vie et devinez quoi ? Les personnes avec TSA AUSSI. Oui, chez les petits avec une grande sélectivité alimentaire c’est plus dur et l’apprentissage (car c’en est un) doit se faire de façon graduelle et supervisée idéalement par un-e professionnel-le en analyse appliquée du comportement.

Votre enfant vomit systématiquement sur la table les courgettes servies avec la peau? Pas besoin d’être psychomotricien-ne spécialisé-e en troubles sensoriels pour savoir que les courgettes avec la peau, ça ne passe pas. En comportemental, on peut intégrer une mini bouchée d’un aliment déjà mangé, pas préféré mais qui « passe », suivi de bouchées d’aliments favoris. On vise la réussite, le plaisir, le long terme et non pas de « forcer ». Je ferai un billet sur certaines techniques tirées de l’approche comportementale de la sélectivité alimentaire bientôt. 

Bref, ne vous contentez pas du « c’est l’autisme, il/elle ne mange que ça », a fortiori si votre enfant est petit-e. Par pitié, ne visez pas non plus l’équilibre alimentaire parfait et les jolis plats Instagram pour enfants mais a priori si vous êtes sur cette page, c’est que vous avez déjà lâché de ce côté-là, tant mieux.

Point 5. La mécanique. La position pour faire caca est primordiale. On conseille (dans les bonnes maternités) aux femmes qui viennent d’accoucher de relever leurs pieds en utilisant un petit banc, pour évacuer sans « pousser fort » se rapprochant au maximum de la position « squat » qui est bien plus favorable que les pieds au sol. En gros, on veut viser la position qu’on aurait dans les bois, dans la nature, qui est souvent celle qu’ont les enfants sur le pot. Passage sur les WC des grands : aïe, ça coince comme par hasard. N’hésitez pas à aménager les WC chez vous ou si l’enfant est petit, à revenir au pot, c’est de la mécanique « de base » mais pour tous les humains, c’est pareil (oui, même pour vous), ça rend l’expulsion des selles bien plus facile.

Point 6. Bouger, bouger et bouger. Se dandiner sur les chansons qu’on aime, se rouler parterre comme un asticot, courir au parc, bref toute activité physique permet un meilleur dynamisme des intestins, c’est prouvé. En yoga, on favorise les torsions pour faciliter l’élimination et certains exercices de respiration abdominale peuvent agir sur la mécanique et donner un énorme coup de pouce. Pas besoin d’être maître yogi pour faire quelques torsions le matin, allongé sur son lit et s’étirer comme un chat et ça ne vous coûtera rien. À tester absolument. 

Point 7. Aller voir un-e magnétiseur-seuse/un-e chiropracteur-e/un-e naturopathe/un-e homéopathe, une licorne argentée un soir de pleine lune pour aider votre enfant: rien de tout ça n’a fait ses preuves. Si la voisine Micheline fait les plus beaux cacas du monde depuis qu’elle a vu Miss Perlinpimpin qui prend 60 euros les 20 minutes sans prise en charge sécu, nous sommes ravis pour elle mais par pitié, ne commencez pas par mettre votre argent dans ces approches non validées scientifiquement. Si vous avez fait tout ce qui est décrit dans les étapes plus haut et que vous avez envie, en plus, de régaler votre enfant avec quelques billes de sucres estampillées Boiron, allez-y, mais non, ce n’est pas en soi une « solution » à votre problème. 

Vous l’aurez compris, la constipation des enfants avec TSA n’est pas une fatalité et il y a beaucoup à faire avant de jeter l’éponge et de s’en remettre aux lavements d’urgence : un vrai suivi médical (médecin traitant, gastro-entérologue dans le public ou dans le privé), un travail de fond et en douceur sur l’alimentation avec un accompagnement en comportemental ou juste avec votre bon sens et en visant des mini-étapes et toujours en réussite, modifier la position pour aller à la selle, plus d’activité physique chaque jour, même 5 minutes et là, on peut parler d’un accompagnement de l’enfant dans ses troubles digestifs.

On a toutes et tous droit à de beaux cacas, bon courage !

Mots clefs: billet blog, prise en charge, TSA, constipation, médical, santé, troubles digestifs, propreté, autonomie